Avec son palais,sa forêt et ses 40 000 habitants réputés bourgeois, Compiègne (Oise) ne fait d’habitude pas parler de lui. Mais ces deux dernières années, les trafics de drogue ont gangrené la ville. Cannabis, héroïne, cocaïne… « Un supermarché de la drogue », dixit un procureur de la République. Si bien qu’au Clos-des-Roses, une cité de 4 000 habitants, le bailleur social — l’Office public d’aménagement et de construction (Opac) de l’Oise — a pris une décision inédite en France. Celle d’évacuer les habitants de trois cages d’escalier. Pour les « abandonner aux dealeurs ». Quant aux bâtiments, ils seront murés.
Les déménagements ont débuté le 9 février. Les exfiltrations plutôt. Au compte-gouttes. Un ou deux petits camions, tôt le matin. On fait vite. Discrètement. Des vigiles, invisibles, veillent. Neuf familles, sur les vingt-quatre concernées, ont déjà été relogées. L’opération se poursuivra jusque début mars;
« Une fausse bonne idée » pour le maire de Compiègne, Philippe Marini (LR), qui met en doute les risques d’incendies et d’explosions mis en avant par le bailleur social à la suite de dégradations. « Je comprends la frustration de l’Opac, mais n’y a-t-il pas d’autres solutions qui ne donnent pas raison aux dealeurs ? »
Les habitants se posent eux aussi des questions : « Que fait le maire ? » s’interrogent-ils constamment. « Une grande rénovation urbaine du quartier vient de s’achever, 70 M€ investis en partenariat avec l’Etat », répète Philippe Marini. Pour ce dernier, les murs que compte dresser le bailleur social ne tiendront pas. Les lieux seront laissés aux délinquants. « C’est à l’Etat de s’assurer qu’ils ne deviennent pas des squats », riposte l’Office public.