En nos temps résolument républicains, lors même que cet adjectif est tout aussi conceptuellement insaisissable que politiquement creux, la question de la restauration monarchique est, sinon taboue, du moins incongrue, sans doute anachronique, peut-être du plus haut comique. Ajoutons à celle-ci l’éminente, l’impérieuse, la brûlante question sociale et un abîme de scepticisme s’ouvre devant des yeux incrédules et des esprits cotonneux. Hormis quelques initiés, dont l’auteur de ces lignes, l’immense majorité de nos contemporains, cognitivement laminés par des années d’Éradication nationale, restent fermement et aveuglément convaincus que 1789 libéra notre pays du joug de l’obscurantisme de l’Ancien Régime et que tout ne fut, sitôt les ténèbres englouties dans les fosses d’aisances de l’Histoire, que lumière, calme et volupté. Quant à imaginer qu’une frange du prolétariat français pût être séduite par la dialectique du nationalisme intégral, voilà qui s’avère purement inconcevable.
C’est pourtant bien cette double perspective qui est au cœur de La monarchie et la classe ouvrière, recueil rassemblant un essai et une enquête – qui associera syndicalistes et anarchistes, tous contempteurs de la « République bourgeoise » –, premier acte de la période maurrassienne de Georges Valois, de son vrai nom Alfred-Georges Gressent, personnalité atypique, rallié, dès sa prime jeunesse, aux idées anarchistes, convaincu de l’innocence de Dreyfus, disciple du théoricien du syndicalisme révolutionnaire Georges Sorel, épousant le royalisme de l’Action française pour s’en écarter – faisant de lui un « dissident » du mouvement, selon l’expression de Paul Sérant, dans son ouvrage éponyme – pour passer ensuite à la postérité comme l’inventeur du fascisme à la française.
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