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Un samedi à Paris : le témoignage d’un spectateur engagé. Partie 2 : « Paris brûle-t-il ? »

Quelques minutes après, j’entreprenais de descendre l’avenue de Friedland, puisque l’Étoile nous était interdite. C’est un spectacle de désolation qui m’attendait : le trottoir disparaissait sous les gravats, les éclats de verre, les débris métalliques, et des grappes de manifestants s’agglutinaient le long des murs, semblant attendre une charge policière qui ne venait pas. Des voitures immatriculées « CD » étaient retournées ou éventrées : un riverain en pyjama, hilare, m’explique alors que ces véhicules appartiennent à des diplomates chinois, tandis que des badauds photographient la scène. Ce qui me surprend alors et me surprendra encore plus quelques heures après, c’est l’apparente indifférence des propriétaires de ces récentes épaves : elles resteront dans la même posture et à la même place des heures durant, bien au-delà de la nuit tombée. D’autres, sans plaque diplomatique et beaucoup moins rutilantes dès l’origine, elles aussi endommagées, seront incendiées par des casseurs même pas encagoulés et, pour au moins deux d’entre elles, bien des heures après leur première dévastation.

Un peu plus bas, d’énormes fumées envahissent la rue et surplombent les toits : « Paris brûle-t-il ? ». Aux carrefours, des voitures achèvent de se consumer, et il n’est pas quinze heures… D’autres s’enflamment encore, et les manifestants y semblent presque indifférents, dans une sorte de mélange de colère et de résignation devant ce qui se passe autour d’eux. Les gilets jaunes s’époumonent, et, dans le même temps, applaudissent les camions de pompiers qui arrivent parfois difficilement. Dans une rue, j’aperçois une petite Peugeot blanche qui commence à s’embraser, et je me précipite vers le camion rouge le plus proche pour prévenir de l’incendie qui commence juste, mais une barricade de bric et de broc flambe tout à côté tandis que de la banque voisine (une agence LCL) sortent aussi d’immenses flammes. Les forces de l’ordre prennent prudemment position tandis que les slogans hostiles à M. Macron se succèdent, parfois mêlés à d’autres appelant la police à rejoindre l’émeute… Étonnante situation, qui peut paraître assez paradoxale, de ces foules qui veulent changer de gouvernement et en appellent aux forces de l’ordre pour mener cette « révolution » ! Difficile ensuite de les traiter de « factieux », car ils ne remettent pas vraiment en cause « l’autorité » en tant que telle mais bien plutôt la légitimité de l’actuel locataire de l’Élysée.

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