Par François Marcilhac
Ce soir, Jacques Chirac a enfin pris sa revanche sur François Mitterrand : il n’était devenu vraiment président de la République, du moins était-ce l’avis des média, que le soir de la mort de Mitterrand, après un hommage remarqué. C’est Emmanuel Macron qui, ce soir, la lui a donnée, par son intervention très sobre, et surtout très macronienne sur les chaînes de radio et de télévision. Car le Chirac de Macron est évidemment un Chirac macronien : mais le plus terrible, est que le Chirac macronien est le Chirac chiraquien.
L’homme forçait la sympathie : le nier serait faire de la basse politique. Pierre Pujo, qui le connut bien, étudiant, me l’avait confirmé. Mais si l’on doit respecter les morts, on leur doit aussi, et plus encore, quand il s’agit d’un chef d’Etat, on doit aux Français la vérité.
Chirac fut l’homme de toutes les démissions, de toutes les reculades, de tous les abandons, de toutes les compromissions, jusqu’à ce mensonger discours du Vel d’Hiv, auquel Mitterrand s’était toujours refusé.
Chirac a tout trahi : tout d’abord ses amis politiques, Chaban-Delmas pour Giscard en 1974, Giscard pour lui-même en 1976 ; le peuple, par une instrumentalisation de la fracture sociale qui se conclut par la nomination de l’ultralibéral Raffarin au poste de premier ministre, aux dépens du gaulliste social Philippe Seguin ; les institutions, par le passage au quinquennat, dans le seul but de se faire réélire président de la République ; la droite, il est vrai à laquelle il n’appartenait pas vraiment, en transformant un RPR encore tant soit peu gaulliste, pour une UMP livrant définitivement la droite parlementaire française au centre libéral ; la France, en achevant, après avoir jeté aux orties l’appel de Cochin, le projet mitterrandien de soumission de notre pays à l’Europe.
Chirac fut un carriériste qui a réussi. Moins que Giscard, il a été l’inspirateur de Macron, c’est-à-dire celui d’une élite politique qui a remisé la nation dans les oubliettes de l’avenir.