On croyait avoir tout vu depuis le déclenchement de la crise des gilets jaunes : des mains arrachées, des yeux crevés, des handicapés renversés de leurs fauteuils, des femmes traînées par les cheveux, des vieillards jetés à terre, une Justice soudainement devenue intransigeante… On s’y était presque habitué, on s’apprêtait à vivre ainsi, actant le fait qu’il y avait désormais des oligarques qui pouvaient tout se permettre et des plébéiens qui devaient baisser la tête, raser les murs ou encaisser des coups.
On s’était habitué aussi à la contestation impuissante des stylos rouges, des blouses blanches, des gilets bleus, et au désespoir de tous ceux dont l’entreprise mettait la clé sous la porte, de tous ces agriculteurs qu’on éteignait discrètement comme une chandelle déjà morte. Mais, que voulez-vous, BFM TV n’en parlait pas, alors, c’était juste un bruit de fond.
On se doutait bien que leurs revendications étaient légitimes, on entendait vaguement leurs cris, on les voyait parfois sur le bord de la route avec leurs pancartes pathétiques, mais que faire, que dire ? On passait son chemin en espérant être épargné par ce tsunami de la réforme, ce typhon de la libéralisation et de la financiarisation qui dévastait tout autour de nous.
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