par Christian Rol
J’achève mes journées en lisant Soljenitsyne dont c’était hier le centième anniversaire. « Le pavillon des cancéreux » est abscons et déprimant comme un roman russe tandis que « L’Archipel du Goulag » et « Le premier cercle » nous édifient un peu plus encore sur ce que fut le régime soviétique dans toute son horreur lorsque tu te prenais 25 ans de camp (si ce n’est une balle dans la nuque ) pour un mot de travers ou ta gueule qui revenait pas au chef.
Je m’avale pas mal de littérature russe ces temps-ci et des biographies velues sur les psychopathes (Lénine, Trotski, Staline et leurs copains) qui firent de la Russie un vaste camp de concentration, laissant loin derrière les systèmes fascistes où seuls les ennemis étaient légitimement malmenés.
Je ne débarque pas complètement sur le sujet puisque j’avais déjà lu « Le livre Noir du communisme » ou le bouquin de Kravchenko (« J’ai choisi la liberté ») et quelques autres témoignages justifiant mes engagements de jeunesse au siècle dernier quand nul ou presque ne songeait à « désespérer Billancourt » selon la formule de ce vieux fou illisible de Sartre.
Et puis, en 1989, au moment de la chute du Mur de Berlin, j’ai mis le cap sur la Roumanie pour combattre les derniers staliniens en place à Bucarest. En fait, une Révolution de Palais organisée par le KGB plutôt que vrai Mouvement de Libération Nationale… Je n’avais pas le recul nécessaire pour comprendre les méandres idéologiques et géostratégiques de cette guerre civile avortée qui me laissait sur ma faim.
Après un séjour épique, je revis à Paris, amoureux d’une belle Hongroise croisée sur place, mais désespérément orphelin de tout combat. Je n’avais pas tiré un seul coup de Kalachnikov, ni contribué en aucune façon à cette belle « Révolution » que les médias occidentaux nous avaient vendu avec force images tragiques, cadavres déterrés de la morgue de Timisoara et exécution ignoble du couple Ceaucescu.
Sur place, les fameuses « Brigades internationales » voulues par Roland Dumas, étaient avantageusement remplacées par des affairistes français et américains. Je songe en particulier aux vieux gauchistes dans le sillage de Jean-François Bizot et de son média faussement alternatif Radio-Nova qui avait ouvert une antenne à Bucarest pour se faire du pognon sur le malheur du peuple indigène. Et je partageais une piaule avec deux nerds américains qui se foutaient pas mal des circonstances tragiques pourvu que leur start up puisse engranger très vite des dividendes grâce à leur réseau très « communautaire » qui allait jusqu’au sommet du Pouvoir provisoire avec, notamment, Petre Roman.
C’était il y a 30 ans et, en rentrant, je pondis un articulet dans une feuille de bonne facture (« Révolution Européenne ») dans laquelle je contai mon amertume… et mon pessimisme devant les perspectives à terme quant au capitalisme le plus cynique et dégueulasse qui ne manquerait pas de profiter de la place laissée par le cadavre communiste. J’espérais me tromper…