Par Henri Peter
L’identité a mauvaise presse actuellement ; Elle est vue comme un repli malsain sur toi, le refus de l’ouverture à l’autre et la porte ouverte aux aventures extrêmes . Avec elle est diabolisé, tout ce qui se rattache peu ou prou à la tradition, qui doit être balayée par un progressisme qui est sa propre ( folle ) référence ;
Et si un autre regard pouvait êtes portée sur elle, non sur un identité idolâtrée pour elle-même , incapable d’affronter le monde, caricature , qui certes peut exister , soyons honnêtes, c’est cette unique vision qu’on nous impose, au marteau pilon médiatique., mais bien au contraire comme celle nous permettant de renouer avec nos origines, une fidélité , qui nourrit une résistance contre tout qui veut nous détruire , plus précisément abolir notre liberté. Qui a dit cette phrase : j’écris pour me justifier. (…) Aux yeux de l’enfant que je fus. Qu’il ait cessé de me parler ou non, qu’importe, je ne conviendrai jamais de son silence, je lui répondrai toujours. » ? Bernanos, qui proclame ainsi sa fidélité à l’enfant que nous avons tous été et qu’il appelle au soir de sa vie…
Cette fidélité profonde, qui nous guide toute une vie, nous la retrouvons chez tous ceux qui ont laissé une grande trace durable dans l’histoire, qui ont pu faire éclore leur vocation, que cela soit Mozart en musique, et tant d’autres artistes. Mais en politique qui nous pourrions nous citer ; de Gaulle malgré ses ombres, tant d’autres, et puis pourquoi pas ne pas citer la litanie de nos Rois ?.. Bref, tout ceux qui ont le talent de pouvoir fonder ce qui dure . . Et plus modestement, mais tout aussi important aussi, chacune de nos familles, a eu cette vocation : où en serions nous, si ne nous avait pas été transmis pieusement comme une « lettre scellée » , ce qui les a fait vivre et perdurer à travers les siècles.
Ne pourrait-on donc pas voir l’identité si décriée, comme un point de départ, non d’arrivée bien sûr, pour résister au totalitarisme ? Peut -être pour éviter les pièges, faudrait il plutôt parler de fidélité, à ce qui nous a été transmis et que nous avons reçus à charge de le renouveler dans notre vocation propre.
On commence à le savoir : beaucoup de royalistes ont participé à l’aventure de la Résistance, De Gaulle, lui-même, appartenait à cette tradition, au moins par ses parents ; Il s’agissait certes de résister à un ennemi, mais aussi pour beaucoup de résister à un totalitarisme tuant les âmes. . D’où ces Résistants, femmes ou hommes ont-ils tiré la force de se lever ?.
Peut être serait-il aussi intéressant de voir en parallèle ceux d’en face, qui étaient soumis en Allemagne, à une idéologie insane et féroce, et certains se sont eux aussi mis en mouvement : résistant même au grand jour au nazisme D’où ont-ils pu tirer leur force dans un pays soumis à la férule de ce que Theodore Haecker appelle l’Antichrist’, sinon dans cette fidélité, un retour aux racines exigeante de leur tradition précisément dans leur foi de chrétiens, catholiques ou protestants réunis . Elle aussi a existé et elle aussi a tiré sa force morale spirituelle et active dans cette fidélité à une liberté qu’ils avaient rencontrée et approfondie depuis leur enfance.
Actuellement un film « Une vie cachée » un biopic sur un héros autrichien Franz Jägerstätter vient de sortir en salle Il conte l’odyssée dans des images somptueuses de celui qui au nom de sa foi catholique a résisté. Le film est discret sur ses profondes motivations. Peut- on en citer quelque unes, qu’il a consignées dans son journal :
« Depuis qu’il ya des hommes en ce monde ; l’expérience nous apprend que Dieu accorde aux hommes le libre arbitre Et Dieu ne descendra pas du ciel pour anéantir le mal ou les méchants.
La Rose Blanche mouvement contemporain de Résistance de jeunes étudiants sans concessions à Hitler, le dénonce et tente aussi d’éveiller les Allemands en terminant par cette phrase un de leurs tracts distribué déjà à Munich en juin 1942 :
« Nous serons votre mauvaise conscience »
Quelles réflexion inspirent ces jeunes héroïques au le grand théologien Guardini en 1945 pour célébrer leur œuvre à Munich ?: « Tout vient de la force de la liberté et de l’esprit, de la profondeur de l’Esprit, des sources du cœur, (..) cela dans la vie quotidienne jusqu’à celle du héros, de l’acte juste et de l’œuvre »
Romano Guardini s’interroge alors sur la dimension sacrificielle de leur acte et de sa postérité.
Au plus profond de cette vie se trouve le sacrifice. ( ) Ils tentaient de mettre l’accent sur les êtres dans leur pure vérité, et d’établir les ordres de l’existence tels qu’ils sont réellement. Par conséquent, il doit être clair ce que « sacrifice » signifie ici, que nous nous approchons à ce que nous avons de plus intime …Il est clair qu’aucune grande action, aucun travail réel, aucune relation humaine juste n’est possible sans que l’homme ne prenne le risque de s’y aventurer.
Guardini s’interroge ensuite sur le destin de cette action commandée par une réponse à un appel de notre conscience chrétienne.
En vérité, cependant, l’existence humaine est portée par elle. Nous avons appris ce que signifie la communauté, s’opposant à l’individualisme des temps précédents ; Elle va plus loin qu’on ne le pense habituellement. ( ;..) Il existe un lien dans ce que nos actes et œuvres ont tissé Encore une fois, c’est précisément notre temps qui a nous enseigné et appris comment l’acte de l’individu devient le destin de tous, dans le mal, mais aussi grâce à Dieu, dans le bien. (..)
Plus haut Guardini précise
« cet acte est confié à la main de Dieu afin qu’il puisse l’insérer dans le grand récit du monde . Il existe donc un lien dans ce que nos actes et œuvres ont tissé.
Guardini conclut par ces mots son hommage :
Mais ils étaient des chrétiens convaincus ; lls vivaient leur foi, et les racines de leur âme s’enfonçaient dans ces profondeurs.que nous venons d’évoquer
Etaient-ils conscients de l’ultime portée de ce qu’ils avaient entrepris, (..) Ils se sont battus pour la liberté d’esprit et l’honneur de l’homme..Leur nom restera à jamais lié à ce combat.
Nous voyons bien ici
qu’il n’y pas dans ces cas ni angélisme ni anarchisme comme le
dit Thibaud Collin,[1]
qu’il n’y a donc pas contradiction entre
la fidélité à notre enfance, cette part
secrète de nous-mêmes et l’engagement
sans concession pour le salut temporel de la patrie et que nous pouvons aussi
le méditer, voir l’appliquer à notre époque.
[1]Homme nouveau numéro du 4 janvier 2020