La menace d’une submersion migratoire est plausible. Suffisamment en tout cas pour que l’Union européenne débloque, mardi 3 mars, une aide de 700 millions d’euros en faveur de la Grèce. Pourtant, dans le même temps, certains politiques et médias versent leurs larmes compassionnelles sur le sort des migrants arrivant à Lesbos. Encore une fois, la déconnexion entre la réalité et le discours est à l’œuvre : les élites peinent à s’extirper de leur moralisme.
De moralisme, il ne saurait être question chez le président turc Erdogan. Ou plutôt si : il utilise le nôtre comme arme de guerre. Il annonce froidement qu’il laissera sa frontière ouverte tant que l’Occident ne lui apportera pas un soutien dans sa guerre syrienne. Il utilise le trafic d’êtres humains comme moyen de pression et en appelle aux sacro-saints droits de l’homme quand la Grèce tente de résister. Il mobilise sa police pour aider les migrants à passer, et crie à la barbarie quand la Grèce mobilise la sienne pour défendre sa frontière. Et nos médias pleins de bons sentiments relayent la propagande turque. Le néo sultan nous a bien compris.
Pire, des ONG les aident. La guerre lointaine d’Erdogan ne nous concerne pas, c’est lui qui a choisi d’ouvrir cette porte sur l’Europe, c’est lui qui nous désigne comme « ennemi » et qui annonce que l’arme employée sera la « submersion migratoire ». Nul complot, nulle manigance opaque, nulle force obscure à l’œuvre : rien n’a été dit plus clairement que ce fait-là. Désormais posons-nous sincèrement la question : les ONG françaises et européennes servent-elles la cause de leur pays respectif en aidant Erdogan à déployer son plan ?
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