Par Louis-Joseph Delanglade*
« Si tous ces gentils migrants rentrent au pays, ce sera une bonne leçon pour tout le monde. »
On les a vus bien équipés et faisant preuve d’une grande agressivité. Pourtant, sous prétexte qu’ils ont été manipulés et instrumentalisés par le pouvoir biélorusse, la presse bien-pensante souligne que ces milliers de migrants massés à la frontière polonaise ne constituent en rien le danger dénoncé par certains. On croit comprendre qu’ils constitueraient une sorte d’erreur migratoire, erreur que l’Union européenne bien soudée devrait résoudre par « des mesures pour que cesse cette opération honteuse ». Inutile de s’inquiéter donc : tout cela n’a rien à voir avec la grande vague de 2015 ou même la pression migratoire constante en provenance d’Afrique du Nord. On ne peut pourtant pas nier que l’offre de Loukachenko correspond à une demande réelle et que ces migrants, loin d’être des pantins, sont d’abord des gens décidés à venir en Europe – comme tous les autres migrants.
En fait, quels que soient leur nombre, leur provenance ou leur parcours, les migrants qui se présentent aux frontières de l’Europe, sont forcément tributaires d’un ensemble de complicités facilitatrices, de la part de tous ceux qui y trouvent leur intérêt. M. Loukachenko les aurait utilisés pour déstabiliser une Union européenne qui lui cherche des poux dans la tête ? Sans aucun doute. Mais, au fond, quelle différence avec les idéologues humanitaires de S.O.S. Méditerranée que leurs états d’âme poussent à aller embarquer les migrants africains au plus près des côtes libyennes pour les imposer ensuite à l’Europe ? Dans les deux cas on cherche à forcer la frontière d’un pays européen, tout le reste est affaire de sentiments (bons ou mauvais, qu’importe) : l’agence de voyages Loukachenko et l’entreprise maritime Aquarius visent pour des motifs différents un même objectif.
Fort heureusement, Varsovie a fait preuve jusqu’à maintenant d’une étonnante et salutaire fermeté, laquelle ne doit pas satisfaire M. Legrand qui a préféré éviter d’en parler. La Pologne a ainsi manifesté sa défiance à l’égard des instances européennes et affirmé dès le début qu’elle ferait respecter son droit exclusif et inaliénable sur ses propres frontières. En employant la force s’il le faut (il l’a fallu parfois) et en déployant une clôture de barbelés (en attendant l’érection d’un vrai mur à l’imitation de l’Espagne, de la Grèce ou encore de la Hongrie), clôture dont les événements ont prouvé l’efficacité. (Photo : Marche des partisans du Parti Conservateur, à Varsovie, le jour de la Fête Nationale, e 11 novembre,).
Les parasites de Bruxelles ont d’ailleurs vite compris qu’il leur serait plus facile de faire pression sur Minsk que sur Varsovie – s’inclinant ainsi devant la volonté politique d’un Etat membre de l’Union mais souverain. Les premiers résultats sont là. L’espoir de passer en Pologne semble avoir abandonné la plupart des migrants, ni soutenus ni encouragés suite à l’interdiction d’accès à la zone frontalière signifiée par les autorités polonaises aux journalistes et aux humanitaristes. Même si une minorité d’entre eux veut croire à un hypothétique « corridor humanitaire » pour passer en Allemagne (affaire à suivre car avec les Allemands il faut s’attendre à tout), un premier repli des indésirables a eu lieu vers des structures d’accueil biélorusses. Minsk a même initié un processus de rapatriement de cinq mille « volontaires ». Pourvu que ça dure : si tous ces gentils migrants rentrent au pays, ce sera une bonne leçon pour tout le monde. Et on pourra dire merci à la Pologne.
*Article paru dans JSF, (les lundis de Louis-Joseph Delanglade)