Passée la divine surprise, voici le temps de l’action. Marine Le Pen sait qu’elle est attendue au tournant. Leurs adversaires ont volontiers reproché aux députés de l’Assemblée leur manque d’assiduité et de visibilité. La réponse était toute trouvée : sans un groupe, impossible de faire sa place.
À présent, tous les moyens sont là, reste au parti à faire ses preuves. Selon le dernier sondage Elabe de BFM TV, une majorité de Français estiment que « le RN sort plus renforcé que jamais du dernier scrutin ». Il ne s’agit pas d’avoir franchi le Rubicon pour finalement y pêcher à la ligne, selon la formule bien connue du général de Gaulle. L’enjeu principal est la crédibilité.
Et tout commence par la tenue, dans tous les registres. D’abord vestimentaire. Marine Le Pen a recommandé aux hommes le port de la cravate. Face à La France insoumise, ils seront la France bien mise. On se souvient qu’il y a cinq ans, pour leur premier jour à l’Assemblée nationale, Jean-Luc Mélenchon et ses « insoumis » étaient arrivés sans cravate. « Il y avait des sans-culottes, il y aura maintenant des sans-cravates », avait clamé bravache le président du groupe d’extrême gauche. C’était pour lui le signe que « le peuple [rentrait] à l’Assemblée ». Sauf que cultiver le style débraillé n’est pas la marque du prolo mais le snobisme du bobo. On pourrait dire son luxe, car si le Black Bloc, étudiant à la Sorbonne, peut sans dommage traîner hirsute et dépenaillé sur le bitume parisien, l’apprenti pâtissier, frais émoulu de son CAP, ne peut prendre les mêmes privautés dans l’hôtel-restaurant où il est employé. Les électeurs, même des classes populaires, sont-ils fiers d’être représentés par Les Bronzés à l’Assemblée ? On peine à le croire. Parce qu’ils ont peu de moyens, ils n’auraient donc le droit, une fois de plus, comme pour la lessive et les yaourts, qu’à des élus au packaging low cost ? « Dans les mouvements ouvriers du XIXe siècle, on valorisait l’éducation, pas la veulerie et la grossièreté », disait Luc Ferry, en 2017. Faut-il que la NUPES, qui a bien moins d’employés, d’ouvriers et d’agriculteurs dans ses rang que le RN, ait trop regardé Les Tuche pour imaginer le peuple hermétique à toute notion d’usage ? Que voulait donc dire le mot « endimanché » sinon, pour les milieux populaires, s’habiller autrement qu’à l’ordinaire pour les grandes occasions ? Et la cravate, accessoire viril s’il en est, est un discret coup de pied de l’âne aux théories déconstructrices de la gauche.
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