Organisé par l’Action française et l’Étudiant Libre, avec la participation d’intervenants de la cocarde, à Paris le 29 avril.
Chers amis et chers camarades,
Conclure un colloque « jeunes » a tout d’une gageure, en particulier lorsqu’on a l’honneur douteux d’être le doyen de la salle et d’avoir le pourcentage le plus important de cheveux blancs. Mais qu’importe ! L’idée d’un congrès « jeunes » me ferait spontanément citer Choron qui déclarait, le 12 juin 1982 dans l’émission « Droit de réponse » de Michel Polac, que « les lycéens c’est des merdeux, des trous du cul, des cons ! ». Evidemment, vous n’êtes pas tous des lycéens, loin s’en faut et cela pourrait vous paraitre outrancier, mais après tout, pourquoi demander l’avis aux jeunes ? Un jeune homme a une arrogance supérieure à son propre poids et c’est à peine s’il ne s’étouffe pas dessous. A quoi bon écouter ceux qui ignorent Eric Rohmer et confondent Puccini avec des formes de pâtes. Certes, il est des exceptions et vous en faites sûrement partie, car vous avez pris la peine de passer votre samedi après-midi à écouter de brillants orateurs plutôt que de poster sur Tik-Tok. Mais est-ce suffisant pour en tirer une règle générale ? Peu s’en faut! Depuis que le droit de vote a été abaissé à 18 ans, la situation française ne s’est guère améliorée. Ce n’est pas encore sa majesté des mouches, mais ce n’est pas jojo non plus et nous avons tous pu constater que malheur à la ville dont le Prince est un enfant. Cependant, j’aimerais mettre cela en pendant d’une citation de Cioran. Celui-ci raconte qu’« à 20 ans, je n’avais en tête que l’extermination des vieux ; je persiste à la pensée urgente, mais j’y ajouterai maintenant celle des jeunes. Avec l’âge on a une vision plus complète des choses ». Malgré la blague évidente, je souscris à ce propos en partie : il existe un problème « vieux » qui est devenu plus urgent à traiter que les habituels problèmes « jeunes » que l’humanité connait depuis les ruminations de Platon contre les jeunes jusqu’aux jeunes de banlieue en passant par Villon et le Pet-au-diable.
Il existe aujourd’hui un bloc des retraités qui fait et défait la politique française plus sûrement que les intrigues des médias ou les combinazione. Ainsi les plus de 65 ans représentent la moitié des votes alors qu’ils ne sont que 20% de la population française. C’est ce poids qui explique à quel point le gouvernement les cajolent et si on réforme les retraites c’est d’abord pour protéger ceux qui en profitent. Tant pis pour ceux qui suivent ! La démocratie mène au gribouille ; elle n’a pas l’opportunité de penser le temps long, celui qui est le seul qui vaut pourtant. Ce bloc des vieux, c’est lui qui désire garder l’euro et rester dans l’Union Européenne, c’est qui lui défend la légitimité de notre système parlementaire et dit démocratique. C’est même lui qui garde l’argent : si 30% des jeunes sont pauvres, ils ne sont plus que 3,8% chez les 60-69 ans.
C’est là des raisons légitimes pour que vos générations prennent la parole. Vous avez raison en tant que jeune de dénoncer la situation existante et celle qui se profile. Votre légitimité en tant que jeune n’est pas d’être jeune au nom d’un vague romantisme révolutionnaire, mais parce que le monde de demain sera le vôtre et qu’il est peu dire qu’il ne donne pas envie : crise climatique, crise des institutions étatiques, déferlement d’immigrations, pauvreté, voilà des maux qui prospèrent aujourd’hui et nous confrontent à des défis. Face à cela on comprend que les jeunes s’abstiennent de voter à 67%. Votre vie est actuellement complexe : vous avez Netflix et Uber Eats pour compenser le fait que vous êtes une génération ayant moins d’aventures sexuelles que vos grands-parents et le Prozac comme amuse-bouche.
Evidemment, dire que les boomers sont un problème, que tout est foutu et que vous êtes des têtes frêles, n’est pas très encourageant. Que faire ? En bon royaliste, ma réponse varie peu : il faut un roi à la tête de la France. Lui seul peut ramener la justice sur la terre des lys. Mais, je serai un peu plus œcuménique : soyez des Antigone. Soyez ceux qui rappelaient la loi naturelle et la justice dans la cité. Les lois iniques sont anarchisantes et le bien commun à l’inverse ordonne. Mais pour cela, encore faut-il le dire et le rappeler, c’est là déjà ce que vous pouvez faire ! Dans notre société qui n’a que des banques comme cathédrales, prenez le temps d’imposer beauté, raison, vertu, tous les honneurs de l’homme. La vie qui vaille et qui vous aille est celle qui répond à cela. Ne vous abîmez pas dans l’activisme, mais prolongez les honneurs de l’Homme dans la cité, et là tout naturellement viendra l’action politique, car comme Antigone, il faudra savoir dire non. Dans la société du spectacle, le non est toujours un blasphème, il déchire le consensus du simulacre, mais il le faut car tout n’est pas acceptable. Notre époque qui fait grand cas de la notion de consentement s’y intéresse fort peu dès qu’il s’agit de le respecter. Alors, il ne faut pas craindre, mais tenir bon et rappeler que les lois de la cité s’arrêtent aux murs.
Il est une deuxième figure que j’aimerais vous donner aussi comme « que faire ? », c’est celle de Jeanne. Déjà parce que Jeanne est grande pourvoyeuse en leçon politique et même éristique nous dit maître Trémollet de Villers, mais encore parce que sainte Jeanne d’Arc nous apprend que la légitimité est la première des priorités politiques. Quand la France est en danger, il faut réaligner les forces autour du pouvoir légitime au lieu de se disperser dans toutes les causes en vain. Mais Jeanne de Lorraine nous apprend aussi qu’il faut partir humblement de nos racines pour sauver la France. Si vos générations veulent sauver notre pays, ce n’est pas en étant des Greta Turnberg qu’il faut agir, mais au contraire en poussant avec ténacité, en sachant sur quel sol on repose. Cette leçon et déterminante et si elle vous apparait claire, alors il ne me laisse qu’à vous faire l’envoi, à vous dire que j’espère avoir l’honneur de ferrailler à vos côtés et que j’espère que vous serez tous présents dimanche 14 mai pour le cortège traditionnel de Jeanne d’Arc.
Francis Venciton