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La France se meurt, sauvons « Emily in Paris » !… ou des priorités politiques en temps de crise à perpétuité

Adègne Nova

Mercredi dernier Emmanuel Macron accordait un entretien exclusif au magazine étatsunien Variety –revue hautement politique s’il en est pour notre président-acteur, consacrée à l’industrie du spectacle – dans lequel il abordait de nombreux sujets : les Jeux olympiques et ses conseils aux organisateurs de ceux de 2028, le cinéma français (malgré un déficit abyssal, le pays va continuer à financer le cinéma comme nulle part ailleurs dans le monde), l’impact des plateformes de flux (vidéo et audio) comme Netflix et Disney, son épouse Brigitte et sa récente apparition dans la série « Emily in Paris »… Nous le voyons bien, ce sont les préoccupations essentielles des Français !

Mais revenons à la série « Emily in Paris », diffusée sous ce titre en France mais titrée « Emily à Paris » au Québec… (petite précision : l’échange est mené juste avant le sommet de la francophonie… une remarque pour défendre la langue de Molière eut été bienvenue, il me semble), le chef de l’État signifie son désaccord avec le nouveau scénario qui poursuit l’histoire à Rome et non plus à Paris ; de fait, il se battra (en bon français dans le texte, comme sait si bien le faire le président-histrion : « We will fight hard to keep Emily in Paris in France ») pour garder la série à Paris car « ‘Emily in Paris’ à Rome n’a aucun sens ! » ; ajoutant, en outre, que la série constitue un véritable coup de pouce en termes d’attractivité pour le pays touristique qu’est la France.

Dans ce même entretien, Emmanuel Macron déplore que les chanteurs soient mal payés. Il souhaite que Daho, Pravi et les autres gagnent autant que Taylor Swift via les plateformes de lecture en continue, ces dernières privilégiant les artistes les plus regardés au détriment de ceux ayant une audience moyenne. Selon lui la rémunération doit être fixée à partir d’un modèle centré sur les écoutes individuelles des abonnés et non au prorata des écoutes totales. Encore un souci pour les Français…

Ce sont donc huit pages qu’occupe notre starlette présidentielle qui lui permettent de se confier : les JO ce sont Léon Marchand, Céline Dion, l’émotion, les beaux monuments ; ses films préférés ont été tournés dans les années 1960-70 (« 100 000 dollars au soleil », 1964, « Le Deuxième souffle », 1966, « Les Tontons flingueurs », 1963… c’était mieux avant, monsieur le président ?)

C’est le chaos dans le pays, les finances sont désastreuses, la guerre est au Proche-Orient… Certains domaines sont des prérogatives exclusives du chef de l’État : la Défense, les Affaires étrangères, l’arme nucléaire… visiblement, aujourd’hui, il faut y ajouter le cinéma, la chanson et la télévision (du pipeau quoi !). Ici, Emily véhicule l’image d’un magnifique village Potemkine : Paris est propre (ses éboueurs ne se mettent pas en grève tous les quatre matins), Paris n’a dans ses rues aucun rat (et même les surmulots du parti animaliers y sont inconnus), Paris est sûre (le Champ de Mars comme le Trocadéro sont indéniablement des lieux de balade pour jeunes filles seules à minuit), Paris ne connaît aucune manifestation (pas de gilets jaunes, de retraités en colère, d’étudiants contestataires, de pro-palestiniens, de féministes, de lgbtqia+, de pro-ivg, d’anti-corrida, etc.), son premier édile n’a pas la fierté d’un ersatz de noble ibérique… Bref, Paris est « the place to be » comme pourraient le dire les bobos parisiens, caste de laquelle est issu notre président de papier glacé !

Il faudrait se rappeler, pourtant, monsieur le président, messieurs les ministres et députés, gens élus, que « la politique est une science, parce qu’elle est un métier », ainsi que l’explique Charles Maurras dans son Enquête sur la monarchie. Non, ce n’est pas donné à tout le monde de faire de la politique, comme il est difficile à Monsieur Moyen de faire du pain ou d’arracher une dent. La politique c’est « l’art de servir l’intérêt général » et cela « suppose instruction, éducation, apprentissage, compétences ». Ce métier « doit supposer les conditions naturelles de toutes ces choses. Il doit exclure les intrigants et les aventuriers. Le problème est d’intéresser à l’honneur et au dévouement », poursuit Maurras. Dans le numéro 146 de L’Action française, du dimanche 26 mai 1918, il cite Aimel, auteur d’une étude publiée par Renaissance sous le titre « Prolégomènes à toute politique future » dans laquelle il explique qu’« il faut traiter la politique comme une affaire sérieuse. Pas d’éloquence vaine. Pas de jeu. Point de Paris sur ce qui arrivera. Une action énergique pour faire arriver le bien. Un choix des hommes scrupuleux, attentif. Par-dessus tout, la conviction que l’activité politique n’est pas l’agitation politicienne. Le sens de son sérieux rendu à la science et à l’art de gérer les affaires de la cité ». Tout est dit !

Les Français attendent sérieux et compétences, là où les hommes de la République font montre de clownerie superfétatoire, superficialité et impéritie. De nos jours, « les hommes politiques, contrairement aux rois capétiens, ne vont plus au fond des choses, quels que soient les sujets (éducation, famille, environnement, sécurité, défense…), ils traitent des conséquences quand il faudrait aller aux causes. Seul un prince peut le faire, car il a pour mission de rappeler les ‘principes’ (c’est un mot que je préfère à celui de ‘valeurs’, moins précis et un peu galvaudé). Le prince est celui qui s’attache à l’essentiel : en rappelant les principes, il donne à ses compatriotes le guide nécessaire à l’action. Je serai ainsi fidèle à ma vocation : en disant les choses telles qu’elles sont, dans le but de contribuer à résoudre les problèmes qui se posent au pays. C’est ce que j’appelle travailler au bien commun ».

Ces mots du Comte de Paris, tirés de son livre paru en 2009, Un prince français, mettent en évidence l’urgence du retour de la royauté chez nous, sans quoi la République – Ve du nom, déjà, quand certains en appellent à la VIe, mais la changer jusqu’à la XXXVIIIe n’y fera rien –, ou ce qu’il en reste de décombres délabrées, nous enterrera…