Depuis le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, la France a multiplié les initiatives de repentance de son passé colonial, à travers la création de commissions historiques, à coup de cérémonies et de discours de contrition. Cependant, cette politique, censée favoriser la réconciliation, se heurte à des critiques récurrentes : absence de réciprocité, instrumentalisation politique et inefficacité diplomatique.
Lors de sa visite officielle au Cameroun en juillet 2022, Emmanuel Macron a surpris ses interlocuteurs en annonçant la création d’une commission chargée d’évaluer la responsabilité de Paris dans les violences qui ont précédé l’indépendance de cette ancienne colonie française (1960). Une initiative souhaitant s’inscrire dans une dynamique plus large de reconnaissance des torts passés de la France en Afrique, amorcée sous couvert de « politique mémorielle » et de « réconciliation ».
La commission, composée de 14 chercheurs et historiens franco-camerounais et co-présidée par l’historienne Karine Ramondy, s’est attelée à étudier 1100 cartons d’archives et 2300 documents déclassifiés pour produire un imposant rapport de 1000 pages. Un document, rendu fin janvier dernier, qui dresse un tableau accablant des relations franco-camerounaises, mettant en lumière les exactions commises par l’armée française : torture, arrestations massives, regroupement de populations dans des camps, bombardements de villages et destruction de localités entières, assassinats des deux principaux leaders indépendantistes de l’Union des Populations du Cameroun (UPC), comme Um Nyobé, exécuté en 1958, et Félix-Roland Moumié, empoisonné en 1960 dans un restaurant suisse. Il souligne également une collusion entre Paris et le régime du Président Ahmadou Ahidjo pour réprimer toute opposition au premier président camerounais. Bien que la France évite de se voir taxée de « pays génocidaire », le rapport pointe du doigt le nombre de « victimes de cette guerre s’élevant à plusieurs dizaines de milliers de Camerounais tués ».
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