Par PHILIPPE LALLEMENT
2020 L’alliance islamo-gauchiste
Trente ans plus tard, sur Radio Notre-Dame, Gérard Leclerc constate que « la question des migrations, liée étroitement chez nous à celle de l’Islam, a pris des proportions énormes dans le débat public, puisqu’il n’est pas de jour qu’elle ne réapparaisse sous une forme ou sous une autre. »[1] L’implication de l’Islam joue en effet à plusieurs niveaux :
– il y a d’abord l’islamisme, avec le terrorisme qui l’accompagne et son chapelet d’assassinats ;
– il y a aussi le remplacement idéologique de la notion de travailleur immigré par celle de migrant-réfugié, dévoilant une convergence d’intérêts entre immigration musulmane et globalisation libérale ;
– il y a enfin l’alliance objective qui s’est établie entre le gauchisme et l’islamisation culturelle, donnant naissance à l’islamo-gauchisme.
Ces trois phénomènes sont des effets de l’épuisement du cycle de la civilisation des Lumières, évoqué par Antoine de Crémiers dans la NRU n° 63, et mis en évidence par les travaux du sociologue Michel Maffesoli[2]. De son côté, la « vieille maison », ayant connu un important rajeunissement générationnel à l’occasion de la réaction contre le mariage homosexuel, s’est investie dans l’anthropologie maurrassienne[3]. Voilà pourquoi, devant le mouvement de remplacement civilisationnel en cours, elle a remis sur l’ouvrage sa réflexion sur l’Islam, au travers de l’immigration. Réflexion menée au regard de l’intérêt national sur le « problème le plus épineux que la France ait à résoudre », menaçant de la « déposséder de la maîtrise de son destin, voire de sa civilisation ».
Pour cela, l’Action française renouvelée a tenu compte des positions fortes prises par le prince Jean dans son ouvrage de 2008 Un Prince français. Depuis la « réconciliation d’Amboise » de 1987, elle a renoncé à tout porte-à-faux avec la Maison de France, comme cela fut le cas en 1937 sur la stratégie d’accès au pouvoir, en 1947 sur le fédéralisme européen et 1959 sur la politique algérienne. Soucieuse néanmoins de son indépendance, elle se garde d’incarner un « parti royaliste », de se rêver en « parti du Prince », ou de gêner l’action propre à la Maison de France. Les positions du duc de Vendôme, aujourd’hui comte de Paris, sur la vocation chrétienne de la France, la laïcité et la place des religions constituent le socle de la réflexion de l’Action française renouvelée, comme celles du duc d’Orléans l’étaient, en 1900, pour l’Enquête sur la Monarchie
Philippe Lallement,
à suivre la semaine prochaine dans : 9/11 – Inclusion ou assimilation… les premières réflexions.
Pour voir les articles précédents :
1/11 – La laïcité comme nœud gordien
2/11 – Quatre générations actives, porteuse de solutions originales
3/11 – 1930 – La dernière époque coloniale
4/11 – 1960 – La décolonisation
5/11 – 1990 – l’Immigration entre communautarisme et assimilation
6/11 – L’intégration communautaire de la « Génération Maurras ».
7/11 – Une ligne de crête instable et menacée
[1] « Migrations, politique et moralistes », Radio Notre-Dame, 4.3.2021, et site actionfrancaise.net au 6.3.2021.
[2] Cf. La nostalgie du sacré, éd. du Cerf, 2020, 360 p., et L’Ère des soulèvements, éd. du Cerf, 2021, 182 p. 22.
[3] Voir, sur ce point, l’indispensable Actualité de Charles Maurras d’Axel Tisserand, Téqui, 2019.