Par Peter Bannister. (LSDJ)
Avec l’approche de la fin de l’état d’urgence sanitaire le 31 juillet, nous nous trouvons paradoxalement devant une 7e vague du covid-19 qui risque de jeter une ombre sur l’été. La recrudescence des infections est avant tout due au sous-variant omicron BA.5 (59% des nouveaux cas au 30 juin) observé d’abord en Afrique du Sud, puis au Portugal, premier pays européen à avoir connu une vague BA.4/5. Les avis sont assez divisés sur son degré de virulence, mais on s’accorde à penser que le BA.5 se caractérise par une transmissibilité plus grande que celle des sous-variants précédents, ainsi que par sa forte capacité d’échapper à l’immunité à la fois vaccinale et naturelle (acquise lors d’une infection par le Covid-19). Antoine Flahault de l’Université de Genève a notamment sonné l’alarme en parlant d’un été qui pourrait « être plus tragique encore que l’épisode caniculaire de l’été 2003 », surtout dans des EHPAD mal aérés. Si certains trouveront de tels propos excessifs, le fait que le BA.5 soit en train de provoquer une nouvelle vague dans plusieurs pays hautement vaccinés interroge au niveau des implications pour la poursuite des campagnes de vaccination ainsi que les « mesures de freinage » à adopter actuellement.
Un aspect surprenant de l’émergence du BA.5 en tant que sous-variant dominant est que son impact sur les populations a été très variable jusqu’à maintenant. En Afrique du Sud, le passage du BA.5 a été relativement court et n’a pas constitué une véritable menace pour la santé publique, tandis qu’au Portugal, il a été accompagné d’une forte hausse des hospitalisations et décès (surtout chez les personnes ayant plus de 70 ans), atteignant au 18 juin le pic de mortalité le plus fort du pays depuis février 2021. Interrogé à ce sujet sur France Info, le médecin généraliste Damien Mascret a cherché à expliquer la sévérité de la vague BA.5 au Portugal en disant qu’ils « n’avaient pas fait la 4e dose », mais une comparaison avec des données sud-africaines concernant la même souche du virus publiées en pre-print le 28 juin suggère d’autres explications possibles. Dans la province du Western Cape, les chercheurs ont trouvé non seulement que les sous-variantsBA.4 et 5 ont fait moins de ravages que le BA.1 (avec un pic 3 fois moins sévère en termes d’hospitalisations et décès, constaté également au niveau national), mais que l’immunité de la population a bien résisté à ces nouveaux sous-variants. Ici les résultats d’une étude à partir des sérologies de donneurs de sang sud-africains (3395 échantillons) en mars 2022 suite à la vague omicron BA.1 sont frappants : 87% des participants avaient des anticorps contre la nucléocapside du SARS-CoV2, donc des anticorps produits naturellement suite à une infection (ce chiffre inclut à la fois des non-vaccinés et des vaccinés ayant également été infectés par le Covid-19). Seulement 10% des participants montraient des anticorps dirigés uniquement contre la protéine spike du virus (des vaccinés n’ayant pas été infectés). Il semble donc clair que l’immunité « robuste » dont parlent les chercheurs du Western Cape serait surtout naturelle plutôt que vaccinale (seulement 37% des sud-africains ont reçu une injection contre le Covid-19). Au Portugal, par contre, 86,15% de la population avaient un schéma vaccinal complet au 10 juin 2022.
Il convient certes d’être prudent dans l’interprétation de ces données : comme le notent Samuel Alizon et Mircea Sofonea de l’Université de Montpellier, les comparaisons entre pays sont délicates, la circulation du virus dépendant non seulement des spécificités de chaque pays en termes de mesures sanitaires mais aussi de leur historique épidémiologique et immunologique. Pourtant, l’existence d’une corrélation négative entre les taux de vaccination au Portugal vs. en Afrique du Sud et l’impact du BA.5 dans les deux pays semblerait renforcer les hypothèses du vaccinologue belge Geert Vanden Bossche, qui a depuis longtemps prédit des vagues d’infection à répétition dans des pays hautement vaccinés, due à la nature sous-optimale d’anticorps vaccinaux peu durables et non-stérilisants. Une idée également évoquée par le médecin sud-africain ShankaraChetty, qui a réussi à soigner 8000 patients atteints du Covid-19 en utilisant notamment des médicaments antihistaminiques.
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