Par Frère Diacre Jean-Yves Marie Métayer-Robbes
Les mots et les petites phrases dénués de sens profond servent l’incohérence, l’ignorance et polluent les esprits.
Ne serait-il pas préférable de faire l’effort de trouver le bon mot, le mot juste, qui permettrait de bien se faire comprendre des autres, de mieux nous comprendre nous-mêmes et de parler pour dire quelque chose d’utile ? Qu’est-ce qu’une phrase utile ? Celle qui va servir à la compréhension et nourrir la connaissance ? Qu’est-ce qu’une phrase inutile ? Celle qui assemble des mots pour écouter si « ça » fait beau et pour voir si « ça » fait rire ? Celle qui enchaîne des jeux de mots pour satisfaire le besoin de parler ? Pour remplir du vide ou échapper à la peur du vide ? Ne faudrait-il pas d’abord chercher ce que le mot veut dire vraiment ?
La langue française est tellement riche qu’un seul mot peut abriter plusieurs significations. Les synonymes peuvent avoir un sens identique ou voisin. Pourtant, chaque mot porte en lui une couleur très particulière. « Qu’y-a-t-il dans un mot ? demandait Shakespeare. Ce que nous appelons rose sous un autre nom, sentirait aussi bon. » Le mot ne serait-il pas une porte qui s’ouvre vers la compréhension mais aussi sur l’imaginaire ? Mais pour ouvrir plusieurs portes, ne faut-il pas associer les bons mots, les mots justes, chaque mot ayant une influence sur les autres dans une même phrase ? Ne cherche-t-on pas le mot « juste » pour se rapprocher de l’idée que nous voulons exprimer comme un tailleur de pierre frappe sur le burin pour donner les dimensions « justes » au bloc qu’il travaille avec précision ? Certes, mais encore faut-il le vouloir et s’en donner la peine. Il semble plus facile pour certains de parler sans faire cet effort permanent de se rapprocher du « juste », pour parler « juste », et non juste pour parler, de tout et de rien. Il y a aussi les marchands de mots, comparables aux marchands de sommeil, ceux qui parlent pour nous endormir, pour nous vendre tout et n’importe quoi.
Comment ne pas penser aux professionnels de la sphère républicaine. Ces gens ont généralement fait quelques études supérieures mais rarement de philosophie ou de psychologie, plutôt de commerce, de management, de finance internationale ou dans une école d’administration publique. Pour eux, « parler » est avant tout un outil de développement ou de vente. Il s’agit de savoir se vendre lorsqu’ils sortent de l’école, certains pour parvenir au pouvoir. Il faut donc d’abord séduire son public, soit en l’amusant, soit en le faisant rêver autour d’une idée banale comme « travailler plus pour gagner plus », soit en manipulant l’assistance avec de fausses théories apprises dans des cercles de stratégie de conquête du pouvoir, dont le but est souvent de diviser pour régner. À force de balancer des mots dans la foule pour brouiller les esprits, à force de jouer son vulgaire One Man Show devant un public souvent formaté, l’homme politique du système devient addict de l’exercice sophistique qui renforce son complexe de supériorité. Nous serions tentés de dire « tout ça pour ça ? » ou bien « tout ça pour quoi ? » Tout ça pour quoi faire au juste ? Bien au-delà d’une satisfaction de l’ego, des égos, le grand carnaval des petites phrases polluantes entretient le système de la pensée unique pour tenter de maintenir l’existence d’un monde pourtant en péril. Et ce monde, c’est celui dans lequel nous vivons vous et moi, mais que nous voyons s’écrouler devant nos yeux un peu plus tous les jours. Il ne semble plus exagéré de dire que lorsque l’expression politique subit une telle pollution psychique, cela réduit le débat à une vulgaire compétition verbale aux intentions douteuses, chacun cherchant uniquement l’adhésion d’un public, tout en roulant pour le même système.
Plutôt que de servir la cause de l’être humain, plutôt que d’ouvrir les portes de la connaissance, ces petits chefs choisissent de duper les citoyens en quête d’un avenir meilleur. Alors, quelle place reste-t-il pour le mot « juste », pour la quête du sens, du bon sens, de l’éthique ?
Avec eux, parmi eux, aucune. Il ne sert à rien de vouloir jouer « juste » au milieu de la cacophonie. La note « juste » sera toujours inaudible lorsqu’elle est entourée de fausses notes.
Les petites phrases futiles et sournoises règnent ici en grandes maîtresses, elles sont même devenues les seules valeurs de référence des pseudo-philosophes et autres intellectuels formatés dans les écoles du prêt à penser.
Quelle est la place du mot « juste » dans le champ républicain et son système médiatico-politique ?
Le républicain, qu’il soit communiste, socialiste, libéral ou bonapartiste, cherche-t-il le dialogue constructif ou veut-il avoir raison lorsqu’il participe à un débat télévisé ? Vouloir avant tout prouver à l’autre qu’il a tort empêche toute démarche philosophique rigoureuse. Le champ politique ressemble alors à un championnat d’échecs, chacun voulant trouver la meilleure stratégie pour parvenir à stopper le Roi. Il n’y a plus de débats d’idées parce que les acteurs politiques n’ont plus d’idées. Ils se comportent en petits soldats aux ordres de leurs supérieurs. Le seul objectif est de marquer des points pour tenter de gagner la partie.
Le républicain n’a plus de culture philosophique et politique digne de ce nom. Il est dans le meilleur des cas un bon comédien qui a bien appris son rôle comme un bon soldat qui a bien appris à tirer et à tuer.
Voilà pourquoi nous assistons à des pièces de théâtre, comiques ou dramatiques, où l’éthique n’y a plus du tout sa place car les discours sophistiques ont remplacé la recherche philosophique fondamentale.
Pour les sophistes, ces « faiseurs d’opinions », ces « montreurs de marionnettes » comme le disait Platon, le pouvoir sur autrui et l’accession au pouvoir l’emportent sur la recherche du « juste ». C’est justement contre le sophisme que Socrate a développé un nouvel art de penser la vie, de penser mieux, de se connaître soi-même, de se poser les questions qui alimenteront notre entendement, en un mot : la philosophie. Philosopher, n’est-ce pas chercher à se rapprocher du juste parce que nous aimons la sagesse ? Mais comment se rapprocher du juste si nous ne cherchons pas d’abord les mots justes qui donneront sens à notre réflexion et participeront à l’élargissement de notre champ de conscience ?
Aussi, pouvons-nous pressentir que ce sera par et avec une pratique philosophique très élargie, devenue très populaire, qu’une majorité d’êtres humains, soucieux de la cause « du bien, du beau et du vrai » , réussira à restaurer l’alliance avec le Divin, comme nouveau paradigme, dans la recherche d’une nouvelle éthique intemporelle.
Mais comment envisager un tel changement en restant dans ce système républicain jupitérien, responsable de la séparation de l’Église et l’état ? Ne s’agissait-il pas pour les révolutionnaires de couper la tête du Roi pour pouvoir ensuite couper tout lien avec Dieu ?
Comment réussir alors à se rapprocher de la sagesse des Rois en restant « soumis » à la pensée unique du système des partis corrompus eux-mêmes « soumis » aux autorités de la haute finance internationale ?
Comment reprendre les commandes de la nation française en obéissant à la république qui est elle-même soumise aux ordres de l’union européenne ?
Le jour où nous serons à l’écoute de la providence de la restauration, la France redeviendra une nation libre et respectée.