Il faut commencer par dégonfler le mythe. Une fois ramené à des proportions normales, l’épisode révèle à quel point le peuple dans son ensemble se défiait du pouvoir, et à quel point la gauche sut instrumentaliser à son profit la répression inutilement sanglante.
Une somme. Avec 610 pages d’un texte fouillé, 110 pages de notes, sans compter les références des sources, la bibliographie et l’index, l’analyse du 6 février 34 que viennent de livrer Olivier Dard et Jean Philippet sera désormais l’ouvrage de référence, pour les historiens bien sûr, mais aussi pour tous ceux qui s’intéressent à la politique en France, à son évolution comme à ses ressorts.
C’est d’abord le résultat d’une véritable enquête policière, plus détaillée et plus précise que celle faite à l’époque par la commission d’enquête parlementaire, dont les auteurs relèvent les dysfonctionnements. Ils ne laissent rien de côté : les articles des journaux de l’époque, à Paris comme en province, les mémoires laissées par les participants, les auditions de la commission d’enquête. Mais au-delà, ils analysent le fait brut : quelle est l’origine sociale des morts et des blessés du 6 février chez les manifestants, leur nombre exact, chez eux comme dans les forces de l’ordre ? Comment évoluent, presque minute par minute, les différents cortèges qui participent à la journée, face à quelles unités de police ? – avec des cartes pour mieux les suivre. Quels types de blessures, par quelles armes ? Que font pendant ce temps les parlementaires, les conseillers municipaux, les chefs des mouvements ? C’est l’étude technique la plus détaillée de la journée et de la nuit du 6 février 34.
La suite
Olivier Dard et Jean Philippet, Février 34. L’affrontement, Paris, Fayard, 2024.