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Face à la tête tranchée de la reine : relire Zweig. (1)

La récente cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques a fait couler beaucoup de salive et d’encre, pour de bonnes ou (et ?) de mauvaises raisons : il n’est pas dans mon intention d’en tirer un bilan, même s’il est tout de même peu surprenant de constater qu’elle a, en France, rouvert quelques plaies toujours mal cicatrisées et qu’elle a nourri, y compris au-delà de notre scène nationale, nombre d’indignations. Quelques scènes et postures, en effet, gâchent un peu (beaucoup, penseront certains) ce qui devait être, selon les autorités olympiques et sportives, une fête de la paix et de la convivialité, à défaut d’être celle de l’amour universel des peuples les uns envers les autres, un bel idéal, certes, mais rarement atteint…

Le soir de cette fameuse cérémonie, j’étais ainsi à la terrasse d’un café, indifférent au spectacle de la Seine, mais un malencontreux hasard et une pluie devenant agaçante me firent rentrer dans le débit de boissons au moment même où, en gros plan, apparaissait la tête tranchée et sanguinolente de la reine Marie-Antoinette (à moins que ce ne soit celle de la princesse de Lamballe…) : cette simple image me transporta d’indignation, je l’avoue, au point d’avoir en public des mots peu amènes à l’égard de ceux qui avaient pu autoriser une telle ignominie ! Une tête tranchée, voilà qui ne me paraît guère appropriée à un événement festif, à moins que notre société soit revenue à l’ère romaine (antéchrétienne) ou qu’elle considère la guillotinade comme un spectacle vivant (sic) destiné à l’édification des masses comme, justement, en cette période terrible de la première République et de la Terreur… Nombre de spectateurs, lors des débats postérieurs sur les réseaux sociaux, arguèrent « c’est notre histoire » pour défendre cette présentation morbide. L’argument s’entend, mais il mérite explication et contextualisation sans forcément mener à acceptation de la présentation de ce fait historique en cette occasion olympique : doit-on valoriser ce qui va à l’encontre de l’esprit humaniste, surtout en un temps où il est de bon ton de dénoncer la peine de mort et à peine enterré celui qui, en France, a fortement contribué à  son abolition au début des années 1980 ? Et, puisque l’on nous parle d’histoire, pourquoi se contenter de cette seule évocation, au-delà des grands principes « Liberté-égalité-fraternité » à qui, d’une certaine manière, l’on peut faire dire ce que l’on veut sans beaucoup de raison et encore moins de mesure ? Mais c’est bien la tête coupée de Marie-Antoinette, cette mal-aimée de l’histoire de France, que les organisateurs ont jetée à la face du monde, crânement…

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