Sophie Lenaerts, 58 ans, est éleveuse laitière en polyculture-élevage à Roy-Boissy (Oise). Elle est aujourd’hui présidente de la Coordination rurale de l’Oise et première vice-présidente nationale du syndicat. Élue aux chambres d’agriculture de l’Oise et des Hauts-de-France, elle est aussi présidente de la section laitière de la Coordination rurale qu’elle représente, au niveau européen, à l’European Milk Board (EMB). Alors que les agriculteurs ont repris la route depuis une semaine, elle explique sa démarche àBV.
Étienne Lombard. Après une semaine de nouvelles manifestations, pouvez-vous nous en dresser un premier bilan : que demandiez-vous, qu’avez-vous obtenu et quelles sont vos demandes non satisfaites ?
Sophie Lenaerts. Pour l’instant, rien de concret n’a été obtenu. Sur la question des surtranspositions, qui consiste à accroître les contraintes des directives européennes lors de leur transposition dans la réglementation française, il faut reconnaître que Michel Barnier a bien voulu s’engager, auprès de nos responsables dans le Lot-et-Garonne, à travailler la question. La surtransposition a privé nos agriculteurs de 75 molécules de soin des plantes, alors que l’on importe des produits depuis des pays qui les utilisent. Le Premier ministre s’est engagé au Sénat à aller très loin dans le règlement de cette question, sur laquelle nous resterons très vigilants.
Ensuite, il y a la question des revenus agricoles qui justifie les blocages que nous faisons en ce moment sur les centrales d’achat. Nous ne visons personne en particulier, mais nous disons qu’il faut en finir avec les marges abusives pratiquées par toute la filière en aval. C’est-à-dire depuis ceux qui nous achètent notre production jusqu’à ceux qui font la revente finale. La fondation Nature et Homme a étudié le parcours d’une brique de lait et s’est rendu compte qu’entre 2001 et 2022, la marge brute de la grande distribution a augmenté de 188 % et celle de nos acheteurs agroalimentaires de 64 %, alors que celle des éleveurs a baissé de 4 %. Cela, aujourd’hui, ce n’est plus tolérable, que ce soit pour nous ou pour les consommateurs. Nous ne demandons qu’une chose : une répartition équitable des marges entre tous les partenaires. Une fois encore, nous ne demandons pas l’aumône, juste de pouvoir vivre de notre travail.
La suite